J’ai pris le parti de cloisonner vie libertine et vie verticale. Ma famille, mes amis, mes collègues, tous ignorent tout de ma vie libertine, de mes aventures sexuelles hors norme. J’ai fait ce choix, comme la grande majorité des libertins, pour éviter les regards éberlués, les questions oscillant entre le jugement et la curiosité malsaine. Et pour ne pas avoir à me justifier.
L’être humain ayant besoin de catégoriser, j’imagine aisément que l’on me classe, dans la vie verticale, dans la catégorie des filles lisses, calmes, consensuelles, sans surprise. Cela m’amuse et j’essaie d’entretenir cette image, au dessus de tout soupçon. Mon jardin secret, ma vie libertine, n’appartenant qu’à moi et mon homme.
Il faut reconnaître qu’au fil des années, j’en montre parfois un peu plus (ce fameux regard de braise / qui put le sexe qui apparaît, alors qu’on lui a rien demandé, dans un contexte autre que libertin), mais c’est une autre histoire.
Distinguer vie verticale et vie libertine a tout de même des petits inconvénients. Explications.
– Tu ne mentiras point –
Officiellement, pour notre semaine de vacances en amoureux, nous n’allons pas au Cap d’Agde mais juste à côté, à Marseillan. Et nous sommes au quotidien très régulièrement invités à des anniversaires (c’est fou comme nos amis peuvent fêter régulièrement leur anniversaire). Et je ne parle pas des trésors d’ingéniosité qu’il faut déployer pour sortir en tenue décente en apparence, quand frère ou amie est présent(e) pour garder la petite, nous permettant mon homme et moi d’aller nous encanailler.
Il faut savoir broder et, chose très importante, avoir la même version, dans les grandes lignes et les détails, que son homme, pour ne pas éveiller les soupçons. Je serais tentée parfois de dire les choses sans détour, simplement : “tu es disponible samedi soir pour venir garder ma fille ? Grosse soirée multi couples et hommes seuls, j’attends avec impatience de bien me faire défoncer”. Politiquement incorrect.
– En confiance tu te confieras –
Libertiner en couple n’est pas anodin, pas neutre. Chaque protagoniste se retrouve dans des situations et configurations pour le moins originales et hors norme. Et même si le libertinage est un mode de vie partagé, chacun suit son cheminement personnel. On vit des moments intenses et authentiques et on tombe parfois sur des peaux de banane.
J’aurais envie (et besoin aussi parfois) de parler de ces expériences et de leur impact sur ce que je suis, en particulier avec des amies, des personnes qui me connaissent depuis longtemps, savent d’où je viens et ce que j’ai déjà vécu.
J’aimerais pouvoir me raconter entièrement, ouvertement et naturellement. Parce que ma vie libertine est une sphère aussi importante que les autres et contribue à mon équilibre. Parce que la liberté du corps et de l’esprit fait fondamentalement partie de mon ADN.
J’aimerais exprimer de vive voix et partager ce que je ressens, ce que je vis, ce qui me fait vibrer, ce qui m’enrichit, mais aussi ce qui m’effraie au travers de mes expériences libertines.
Mais je ne veux pas, même si toutes mes amies ne réagiraient certainement pas de la même façon, entrer dans le débat du pourquoi ? comment ? avec qui ? c’est pas vrai ?! Pour qu’au final elles concluent que ce sont des sordides histoires de cul – au mieux – ou que je suis un catin sans respect pour elle même et pour le reste de l’humanité – au pire. Ambiance.
J’ai été plusieurs fois à deux doigts (sans allusion osée) de me lancer dans une confession irréversible avec celle que je considère comme ma meilleure amie. Parce qu’elle me ressemble beaucoup dans ma vie verticale, partage de nombreux points de vue, me comprend et est toujours là quand j’ai besoin d’elle. Mais je n’ai pas osé avouer mes crimes. Mords ta langue, trinque à l’amitié et laisse la vivre sa vie sur laquelle ton libertinage n’a absolument aucun impact.
– L’étalage de la chair et de ses moyens de subsistance tu fuiras –
Il est une expérience spéciale (et inaccessible en vrai) que la libertine curieuse et délurée que je suis adorerais découvrir et vivre : Participer à un film X, dans l’esprit porno chic Dorcel, tant qu’à faire.
L’occasion de voir l’envers du décor (changer de point de vue est toujours instructif) et d’aborder le sexe sous un angle artistique. Et aussi, je l’avoue, l’opportunité d’immortaliser ces attitudes et postures avec lesquelles je suis de plus en plus à l’aise (regard, sourire coquin et plus encore à tester et à assumer) et qui semblent faire leur petit effet sur les hommes.
Ce qui suppose de lever l’anonymat que je préserve farouchement et de s’exposer au risque d’être reconnue (et jugée) par mon entourage au sens large, appartenant à toutes les sphères de ma vie (familiale, amicale, professionnelle).
Même si tout ça est bien tentant, je vais y réfléchir encore un peu.