Le temps est au recueil.
Les témoignages de sympathie et de tristesse pleuvent.
Le maître BDSM parisien reconnu et incontesté n’est plus.
Patrick Lesage est mort.
Paix à son âme.
La soumise que je ne serai pas
Comme de nombreux libertins, je me remémore ces moments où nos chemins se sont rencontrés.
A plusieurs reprises, nous nous sommes croisés au cours de soirées au Cap. Je fantasmais littéralement une séance de domination / soumission avec lui. Une connaissance commune m’avait encouragé à le lui demander directement. Mais, je l’avoue, je n’ai jamais osé l’aborder, trop impressionnée par la réputation qui le précédait, lui qui pourtant paraissait simple et avenant et dont on ne pouvait soupçonner au 1er coup d’œil l’instinct de domination.
Par le biais d’une autre connaissance commune, une date pour une séance d’initiation avait été calée. Mais, la faute à un conflit dans son agenda chargé, elle avait finalement été annulée. Je n’avais pas insisté, sentant peut être qu’au fond je n’aurais pas été une soumise à sa hauteur (pour avoir expérimenté la soumission et me révéler davantage brat).
La découverte du donjon
A l’occasion d’une soirée multi-couples et hommes seuls, mon homme et moi avions eu la chance de découvrir son univers, son fameux donjon. Une cave voûtée sur deux niveaux, en plein Paris, composée de plusieurs pièces plus ou moins grandes et aménagées avec des instruments plus originaux les uns que les autres (et faits maison pour la plupart me semble t-il). Le maître n’était pas présent ce jour là mais avait laissé les clefs à l’organisateur de soirées et ami, en toute confiance.
Pour pénétrer dans son antre, il fallait descendre un escalier dont les murs étaient longés, presque jusqu’au plafond, par des bocaux contenant chacun la petite culotte ou le string d’une femme qui s’était prêtée au jeu de la soumission.
Au milieu du mur de l’espace salon, trônait un tableau immense, fait sur demande du maître, le représentant avec les soumises qu’il affectionnait particulièrement. Ce tableau m’avait complètement fascinée. Je l’avais observé, longuement, essayant de capter tous les détails (même infimes) et de le figer dans ma mémoire.
Je serai bien curieuse de savoir ce que ce donjon, ces bocaux et ce tableau vont devenir.
La mort & les vivants
De tous ces moments, au Cap et sur Paris, il me reste une étrange sensation que nous nous sommes effleurés, PLS -comme il était appelé dans le milieu- et moi, à la fois très proches et très éloignés l’un de l’autre.
Sa mort me renvoie inexorablement à la mort d’autres. Ceux qui ont fait un bout de chemin à mes côtés, avant de partir (trop tôt) et me laisser parmi les vivants, ceux qui restent et qui doivent apprendre à sécher leurs larmes et continuer d’avancer.
Plus qu’une énumération ou nostalgie macabre, je fais le constat qu’être confronté à la mort, de près ou de loin, nous met tous certainement face à nous même, face à nos convictions & nos certitudes, nos doutes, nos peurs & nos regrets.
La mort bouscule, interroge, rebat les cartes, parfois radicalement. Et chaque mort nous enseigne une leçon.
Par le passé, j’ai appris que la vie vaut la peine d’être vécue, même si on ne peut pas tout maîtriser.
J’ai aussi appris qu’il faut donner de soi et distiller sans compter des sourires pour que la vie demeure une fête animée et chaleureuse.
Je retiens maintenant une nouvelle leçon : c’est en osant vivre pleinement et selon ses propres choix que l’on laisse véritablement une empreinte en ce bas monde.
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