Devenir la femme que je veux être

Après avoir été peu active plusieurs mois (mis à part un rendez-vous en duo pour lequel les planètes se sont enfin alignées) et après avoir traversé une phase d’introspection nécessaire, j’ai remis les pieds dans une soirée libertine.

Cela faisait donc bien longtemps que je n’avais pas revêtu une tenue odieusement sexy, paré mes lèvres de rouge et enfilé des talons aiguille, pour déambuler dans une soirée coquine. Et de nombreuses questions me taraudaient.

Donner envie est une chose (que je maîtrise, me semble t-il). Mais avoir envie en est une autre. Il me faut l’étincelle qui met le feu aux poudres. Avoir envie d’une personne, d’une situation et/ou d’une configuration. Certes l’appétit vient en mangeant et commencer timidement n’enlève pas le plaisir terriblement intense et addictif par la suite. Mais pour que cela fasse sens pour moi, l’impulsion doit venir de moi, alimentée par mon désir. Et je ne sais pas le déclencher sur commande. Tout comme je ne suis pas à l’aise quand je dois m’aligner sur un rythme qui n’est pas le mien. Lors de cette soirée de « reprise », je me demandais comment cela allait se passer, si j’allais avoir envie de jouer et comment je pourrais profiter de la soirée en restant en phase avec moi-même.

Laisser passer le 1er tour

La soirée, qui se déroulait dans un lieu que nous ne connaissions pas encore (et qui ouvrait fraîchement ses portes), démarra par une heure dédiée aux couples : arrivée, bar, animation ludique et bon enfant (qui consistait à créer autour de volontaires des bulles géantes de savon).

Les hommes arrivèrent donc en décalé, regroupés dans la pièce attenante à la nôtre, pour un brief préalable par l’organisateur. Et au GO de celui-ci, tout s’enchaîna très vite : une véritable nuée d’une quarantaine d’hommes décidés envahit la grande pièce dédiée aux coquineries dans laquelle nous nous trouvions. Waouh !

Les femmes les plus joueuses et gourmandes les accueillirent instantanément par 2, 3 ou 4 et se lancèrent aussitôt dans les hostilités. De mon côté, je fus quelque peu déstabilisée par ce démarrage soudain. Je n’étais pas prête, à ce moment-là, à me lancer avec frénésie dans la mêlée. Je restais donc spectatrice du 1er tour, admirant le spectacle charnel des corps à corps impatients (plus voyeuse qu’exhibitionniste je suis, en même temps)? Je remarquais au passage que je n’étais pas la seule femme dans cette posture (ce qui me rassura, j’avoue).

Me laisser tenter

Pour être tout à fait honnête, plusieurs hommes, connus et inconnus, m’ont approchée, à tâtons, venant engager la conversation pour prendre la température et tenter plus ou moins ouvertement leur chance. Je me montrais cordiale et souriante mais sans laisser d’ouverture (notez le jeu de mots coquins). Malgré cet intérêt très flatteur, ma curiosité fut titillée non pas par un homme mais par une machine.

En complément des matelas, la pièce comprenait en effet de nombreux équipements originaux permettant de varier les configurations et les plaisirs. Parmi ceux-ci, un flipper réaménagé de façon à accueillir en son sein une coquine (ou un coquin) à genoux et doté d’une caméra intérieure permettant à la fois aux protagonistes (à l’extérieur donc) de voir les expressions du visage de la demoiselle culbutée et à celle-ci de voir l’agitation autour du flipper. Petit détail rigolo : pour activer cette double caméra, il fallait glisser des jetons dans la fente du flipper (pas de jeu de mots coquins ici, restons concentrés).

Une configuration unique et un équipement conçu sur mesure, que je voulais absolument expérimenter. Une fois positionnée en levrette dans les entrailles du flipper, il faisait une chaleur certaine mais supportable. Je pus suivre en direct les assauts de 4 soldats, comme ils purent admirer mon sourire en retour. Une configuration originale, que mon homme n’osa pas photographier (tant pis, cela me donnera l’occasion de réitérer l’expérience une prochaine fois). C’est sur cette expérience rigolote, excitante et imprévue, que j’avais désirée et dans laquelle je m’étais lancée au moment que j’avais choisi, que je retrouvais les plaisirs libertins.

Une pause s’imposa, au cours de laquelle je discutais avec le barman (qui ne me laissait pas indifférente) ainsi que d’autres coquins. Presque sans transition, me voilà sur un lit, rapidement entourée. Je ne me souviens plus précisément comment je fus amenée à rejoindre cet endroit (il faut croire que je me laissais porter par la soirée et l’ambiance). Mais les interactions avec les 4 coquins présents furent pleines d’énergie, de bienveillance, de respect et de générosité. Le barman, qui avait fini son service, était dans les parages mais déjà occupé avec une autre libertine, qui le suçait avec gourmandise. Il m’invita à venir me joindre à elle, mais je sentais bien qu’elle voulait le déguster en solo et par respect pour elle, je restais à distance et concentrée sur les coquins qui m’entouraient déjà. Quand elle s’allongea, ouverte aux pénétrations du barman, il avait disparu. “Ben il est parti où ?” dit-elle. “Je ne sais pas” ai je répondu, aussi surprise qu’elle. Oups, pas correct pour elle. Et dommage pour moi, car j’aurais bien aimé le déguster par la suite.

Un instant de douceur inattendu

Revenons à nos moutons. Sur les 4 coquins qui vinrent m’entreprendre, deux furent particulièrement aux petits soins et me firent don de leur sperme. Comme vous pouvez l’imaginer, mon homme ne manqua pas une miette des deux éjaculations faciales. J’aurais pu poursuivre sur ma lancée et avoir davantage de partenaires, mais je n’en avais pas envie.

Ce fut à mon tour de regarder mon homme coquiner. Il avait joué au cours de la soirée mais était inspiré à nouveau. Sur le lit rond central, une libertine était à l’œuvre avec 2 autres coquins. Il fut autorisé à les rejoindre. J’admirais la scène, sentant de mon côté la pression et l’excitation redescendre. Un coquin vint s’asseoir à côté de moi et engagea la conversation. Je posais ma tête sur ses genoux, pour me relâcher encore davantage, sans quitter mon homme des yeux. Le coquin me parla du nombre d’éjaculations qu’il avait eues et de son regret de ne plus être potentiellement opérationnel pour moi. Je l’écoutais, alanguie. Dans cet instant improbable, qu’il semblait apprécier lui aussi, il y avait presque de la tendresse.

Dépasser les injonctions

Avec le recul, la soirée fut réussie et mes craintes plus d’actualité. J’avais pu aller à mon rythme et faire librement les choses comme je l’avais senti. J’ai conscience qu’écrire cela peut paraître surprenant, surtout pour une libertine “aguerrie”, qui n’en est pas tout du moins à sa 1ère soirée et parce que dans l’absolu, rien n’est obligatoire en soirée libertine. Et pourtant.

Il y a les injonctions. Pas celles que l’on reçoit mais celles que l’on s’impose, encore plus sournoises et oppressantes. En tant que femme, on nous apprend / on nous éduque à être gentille, à l’écoute, bienveillante, dans l’empathie et serviable. C’est ce que l’on attend de nous, c’est donc comme cela que l’on peut être aimée.

De ces caractéristiques attendues (qui ne devraient pas être exclusivement féminines) à des injonctions induites, il n’y a qu’une fine frontière. Le piège est là : Finir, en tant que femme, par être inconsciemment dévouée aux désirs et aux besoins des autres et faire plaisir pour se sentir légitime.

Sur la scène des soirées libertines (comme lors de rencontres coquines), où chacun(e) joue un rôle avant de se mettre plus ou moins à nu, les mécanismes peuvent être les mêmes, à mon sens.

Pour moi, en soirée libertine, cela se traduisait par me lancer parce que tout le monde se lance / parce qu’il ne faut pas louper le train qui part, parce qu’il y a une forme d’empressement / d’urgence à consommer, pour être conforme à une réputation qui me précède / parce qu’on s’attend à ce qu’une femme qui se revendique libertine joue (voir impressionne), parce que mon homme aime me voir jouer et se lancer dans mon sillage. Dans le consentement et sans occulter le plaisir pris au final, une fois plus dans l’ambiance et dans l’euphorie. Mais, avec le recul, en suivant des schémas dictés par des injonctions.

La 1ère étape est d’en prendre conscience.

La 2ième est de clarifier mes envies indépendamment des projections des autres, identifier mon désir comme mon non-désir.

La 3ième est de toujours l’assumer.

Pour laisser derrière moi la femme que je dois être et aller vers celle que je veux être.

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